Partouze pour tous…

Né en 1933 à Boussu dans la région minière du Borinage au sein d’une famille ouvrière modeste (son père était couvreur), l’écrivain belge Marcel Moreau, auteur d’une œuvre de grande amplitude[1], est décédé à Bobigny en 2020 des suites du Covid-19.

À la mort de son père en 1948 après un accident du travail, il vit de petits métiers avant de devenir aide-comptable à Bruxelles pour le journal Le Peuple, puis, en 1955, correcteur pour le quotidien Le Soir.

En 1962, Marcel Moreau publie chez Buchet-Chastel son premier roman, Quintes, très favorablement accueilli par Simone de Beauvoir ainsi que par Dominique Aury (alias Pauline Réage, auteure du sulfureux Histoire d’O.) qui l’introduit chez Gallimard pour Bannière de bave (1966).

Il emménage à Paris en 1968 où il continue son métier de correcteur (Encyclopédie Alpha, Le Parisien libéré et Le Figaro). Considéré comme un écrivain marginal, au style verbal fort singulier – véhément et organique, teinté de lyrisme et d’envolées paroxystiques, tout à la fois caressant et bousculant –, il est l’auteur d’une œuvre ample et foisonnante, foncièrement charnelle.

Son roman le plus connu est Julie ou la dissolution[2] (Éditions Christian Bourgois, 1971), un ouvrage foisonnant et sidérant que Les Impressions nouvelles ont ressorti récemment dans la célèbre collection patrimoniale belge « Espace Nord ».

Résumé :

« Julie Malchair, nouvelle dactylo pour une revue scientifique, est une femme d’une beauté charmante et perturbante, apparemment sans passé. Elle fait irruption dans la vie de Hasch, correcteur, et dans celle de ses collègues.

Par sa paresse et sa perversité naïve, elle les entraîne à se libérer des contraintes que la routine et les règles de la vie sociale leur imposent. S’ensuit alors une dérision totale du travail, notamment par l’introduction du vin et de drogues qui conduisent à un festin orgiaque dans le bureau.

Sa tâche accomplie, Julie disparaît. »

Un texte anarchique finement ciselé se concluant sur une apothéose sexuelle débridée, à ne pas mettre entre toutes les mains…

PETRONE

Julie ou la dissolution par Marcel Moreau, préface de Carl Norac, postface de Corentin Lahouste, Bruxelles, Éditions Les Impressions nouvelles, collection « Espace nord », janvier 2021 [édition princeps juin 2016], 196 pp. en noir et blanc au format 12 x 18,5 cm sous couverture brochée en couleurs, 8,50 €


[1] Quintes, Buchet-Chastel, 1962, Bannière de bave, Gallimard, 1966, La Terre infestée d’hommes, Buchet-Chastel, 1966, Le Chant des paroxysmes, Buchet-Chastel, 1967, Écrits du fonds de l’amour, Buchet-Chastel, 1968, Julie ou la dissolution, Christian Bourgois, 1971, La Pensée mongole, Christian Bourgois, 1972, L’Ivre livre, Christian Bourgois, 1973, Le Bord de mort, Christian Bourgois, 1974, Les Arts viscéraux, Christian Bourgois, 1975, Sacre de la femme, Christian Bourgois, 1977, Le devoir de monstruosité in Obliques, 12-13, 1977, Discours contre les entraves, Christian Bourgois, 1979, À dos de Dieu ou l’ordure lyrique, Luneau Ascot, 1980, Orgambide scènes de la vie perdante, Luneau Ascot, 1980, Moreaumachie, Buchet-Chastel, 1982 Cahiers caniculaires, Lettres Vives, 1982, Kamalalam, L’Âge d’homme, 1982, Saulitude, Accent, 1982, Londres, Christian Calméjane, 1983, Incandescence et Égobiographie tordue, Labor, 1984, Monstre, Luneau Ascot, 1986, Issue sans issue, L’Éther Vague, 1986, Le Grouilloucouillou, en collaboration Roland Topor, Atelier Clot, Bramsen et Georges, 1987, Treize portraits, en collaboration avec Antonio Saura, Atelier Clot, Bramsen, et Georges, 1987, Amours à en mourir, Lettres Vives, 1988, Opéra gouffre, La Pierre d’Alun, 1988, Mille voix rauques, Buchet-Chastel, 1989, Neung, conscience fiction, L’Éther Vague, 1990, Grimoires et moires, Éditions Altamir, 1991, L’Œuvre gravé, Didier Devillez, 1992, Chants de la tombée des jours, Éditions Cadex, 1992, Le Charme et l’Épouvante, La Différence, 1992, Noces de mort, Lettres Vives, 1993, Stéphane Mandelbaum, Didier Devillez, 1992, Tombeau pour les enténébrés (en collaboration avec Jean-David Moreau), L’Éther Vague, 1993, Bal dans la tête, La Différence, 1995, La Compagnie des femmes, Lettres Vives, 1996, Insensément ton corps, Éditions Cadex, 1997, La Jeune Fille et son fou, Lettres Vives, 1998, Extase pour une infante roumaine, Lettres Vives, 1998, La Vie de Jéju, Actes Sud, 1998, Féminaire, Lettres Vives, 2000, Lecture irrationnelle de la vie, Complexe, 2001, Corpus Scripti, Denoël, 2002, Tectonique des corps, Les Amis de L’Éther Vague, 2003, Morale des épicentres, Denoël, 2004, Adoration de Nona, Lettres Vives, 2004, Nous, amants au bonheur ne croyant…, Denoël, 2005, Tectonique des femmes, Éditions Cadex, 2006, Souvenirs d’immensité avec troubles de la vision, Éditions Arfuyen, 2007, Insolation de nuit, avec Pierre Alechinsky, La Pierre d’Alun, 2007, Oraisons charnelles et autres prières des corps en sens inverse du ciel, Lettres Vives, 2008, Une philosophie à coups de rein, Denoël, 2008, Des hallalis dans les alléluias, Denoël, 2009, La Violencelliste, Denoël, 2011, Un Cratère à cordes, Les évadés du Poème 2, 2013, De l’Art Brut aux Beaux-Arts convulsifs, correspondance Jean Dubuffet/Marcel Moreau, L’Atelier contemporain, 2014.

[2] Marcel Moreau donne au mot dissolution un sens qu’il n’a pas, construit sur dissolu : « Dont les mœurs sont relâchées, dépravées. Exemple : Existence dissolue » (Larousse).

Date de publication
jeudi 21 janvier 2021
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